Suite à une succession ou à une donation avec réserve d’usufruit, vous êtes usufruitier d’un bien immobilier et vos enfants en sont nus propriétaires. Être usufruitier, c’est avoir la jouissance du bien c’est-à-dire, pouvoir l’habiter ou en percevoir les revenus s’il s’agit d’un bien locatif.
Vous envisagez la vente de ce bien immobilier démembré et vous souhaitez connaître les différentes possibilités de réinvestissement de ces fonds ?
Il est tout d’abord utile de rappeler ici que la vente ne peut avoir lieu qu’avec l’accord conjoint de l’usufruitier et du nu-propriétaire. Vous allez voir que plusieurs solutions sont possibles quant au sort du prix de vente.
Première solution : le partage du prix
En principe, lorsque le bien est vendu, le prix doit être partagé entre l’usufruitier et le nu-propriétaire (C. civ art 621). Cette ventilation est faite par votre notaire en fonction de la valeur respective de chacun des droits qui peut être faite soit en fonction de la valeur économique de ces droits ou en fonction du barème fiscal de l’article 669 du CGI (cette dernière étant la plus pratiquée même si souvent défavorable à l’usufruitier).
Il convient de s’interroger sur l’opportunité de cette solution de partage du prix : est-ce que cela correspond aux objectifs des vendeurs ?
Le démembrement du bien immobilier résulte en effet souvent d’une donation aux enfants avec réserve d’usufruit au profit des donateurs. Ce type de donation répond en général à un double objectif :
- Minimiser le montant des droits de donation en abaissant la valeur donnée : la valeur transmise sera celle de la nue-propriété. Au décès de l’usufruitier le bien reviendra au nu-propriétaire en franchise de droit ;
- Permettre aux parents de conserver l’usage et la jouissance du bien donné. La réserve d’usufruit peut ainsi traduire une volonté de continuer à habiter le bien ou de bénéficier de revenus complémentaires par la perception de loyers s’il s’agit d’un immeuble de rapport.
Avec la répartition du prix de vente, usufruitier et nu-propriétaire perdent tout l’intérêt de la donation avec réserve d’usufruit réalisée.
Deuxième solution : le remploi des fonds
La vente du bien immobilier démembré a pu être motivée par le souhait du parent usufruitier de vivre dans un bien plus petit ou situé dans une autre localité, ou encore d’investir dans un immeuble de rapport pour obtenir des revenus complémentaires. Si usufruitier et nu-propriétaire sont d’accord, il est tout à fait possible de remployer le prix de vente dans un nouveau bien immobilier et d’y reporter le démembrement de propriété. Il conviendra cependant de prendre quelques précautions : il faudra convenir du sort du prix de vente dans l’acte de vente et déclarer le remploi du prix dans l’acte d’acquisition du nouveau bien afin de reporter le démembrement.
Vous pouvez également remployer les fonds démembrés dans un placement financier (contrat de capitalisation/contrat d’assurance-vie). La souscription en démembrement sur ce type de support est tout à fait possible. Une déclaration sur l’origine des deniers ainsi qu’une convention de démembrement devront être réalisées pour que la répartition des droits soit conventionnellement organisée. Au décès de l’usufruitier la pleine propriété sera reconstituée sur la tête du souscripteur nu-propriétaire. Le contrat sera maintenu et se poursuivra sous les mêmes conditions.
Troisième solution : Remise du prix de vente à l’usufruitier
La dernière solution consiste à remettre l’intégralité du prix à l’usufruitier qui disposera alors de ce que l’on appelle un « quasi-usufruit ». L’usufruitier aura des droits très étendus puisqu’il pourra disposer à sa convenance de l’intégralité de la somme comme un véritable propriétaire, sans nécessité d’obtenir l’accord du nu-propriétaire. Ce dernier n’a plus de droit direct sur le bien mais un droit de créance contre l’usufruitier.
Une convention de quasi-usufruit sera nécessaire pour organiser les rapports juridiques des parties mais également dans un intérêt fiscal. Cette convention devra être établie par acte notarié ou par acte sous seing privé enregistré. La rédaction de la convention de quasi-usufruit confère en effet un avantage fiscal non négligeable puisqu’au décès de l’usufruitier, la créance de restitution du nu-propriétaire devient exigible et constitue ainsi un passif de succession déductible fiscalement, ce qui diminuera donc l’assiette des droits de succession.
Si vous envisagez la vente d’un bien immobilier démembré, interrogez-vous-en tout premier lieu sur vos besoins réels et vos objectifs afin d’opter pour la meilleure utilisation des fonds.
Pour toutes questions, n’hésitez pas à prendre contact avec l’un de nos conseillers.